
Avec Born Again, Frank Miller et David Mazzuchelli ont donné naissance non seulement à un chef d’oeuvre mais aussi à une histoire qui sonne comme un véritable point final aux aventures de Daredevil.
La dernière page (inspirée de la pochette d’un célèbre album de Bob Dylan) sur un Matt Murdock sans costume, ayant tout perdu mais ayant finalement trouvé le bonheur et l’amour dans ce dénuement le plus total n’appelle aucune suite et le lecteur peut très bien s’arrêter là en reconnaissant cette fin comme définitive.
Autant dire que cela ne fait pas vraiment les affaires de Marvel et de l’editor de la série Ralph Macchio qui ne voient pas trop comment relancer la série sur de nouveaux rails.
Chance pour eux, Miller a encore une histoire qu’il souhaite raconter.
En fait, l’auteur de Dark Knight souhaite surtout travailler avec Walt Simonson, artiste qu’il admire et ami de longue date vu qu’ils ont partagé un studio ensemble à la fin des années 70 ( avec Howard Chaykin et Jim Starlin).
Macchio accepte la proposition des deux artistes qui lui demandent tout de même un délai pour produire leur histoire.
L’editor décide donc de produire un fill-in tout en continuant de démarcher les auteurs, Miller n’ayant aucune intention de poursuivre ensuite, et programme donc l’arc en deux parties pour les numéros 235 et 236.
Miller rédige le script du premier épisode avant que la machine ne soit stoppée net sans pouvoir prendre son envol.
En effet, Macchio a entre temps trouvé un repreneur pour la série: Steve Englehart (on y reviendra plus tard).
Sauf que le scénariste des West Coast Avengers demande à ce que son premier numéro paraisse au début de l’été afin de bénéficier de meilleures ventes.
L’editor décide donc de mettre le projet de côté afin de laisser le temps à Englehart de s’installer sur Daredevil.
Il laisse un délai ouvert aux deux artistes pour continuer à travailler sur leur arc avec l’intention de le publier plus tard.
Mais comme le déclara Simonson « si un artiste n’a pas de deadline, le projet ne sera jamais terminé ».
Le brave Walt est accaparé par X-Factor tandis que Miller se consacre à Dark Knight et Year One avant de partir tenter sa chance à Hollywood.
Macchio tentera pourtant de ressusciter le projet quelques mois après en proposant aux auteurs de le publier sous la forme d’un one-shot (annual? MGN?) mais ni l’un ni l’autre ne trouveront le temps ou l’envie de s’y consacrer.
Peu d’informations ont transpiré depuis sur cette histoire inédite.
Tout juste sait-on que Miller avait rédigé le script entier du premier épisode, que le titre devait être « The Devil’s Own », que l’histoire devait traiter de pédophilie et de prostitution enfantine (du Miller pur jus donc) et qu’elle aurait accueilli Doctor Strange en guest star (vieil amour contrarié puisqu’on se souvient que Miller devait un temps reprendre le Doc en compagnie de Roger Stern).
La seule chose finalement publiée fut la couverture de Simonson (encré pour l’occasion par Bill Sienkiewicz) et utilisée pour orner le premier numéro écrit par Nocenti (avec Barry Windsor Smith aux dessins).
Cette couverture est bien connue des lecteurs français puisqu’elle fut la couverture du premier numéro de la version (non) intégrale Daredevil publiée par Semic.