Graphic Nuggets, Red is the New Black

-I) What is and what should never be (Daredevil 237)

Daredevil_Vol_1_237.jpg
© Marvel Comics

Voici donc le seul et unique épisode du run avorté de Steve Englehart sur Daredevil.

Autant dire que la pression était énorme sur ses épaules tant le souvenir du Born Again de Frank Miller et David Mazzuchelli est encore dans tous les esprits.
Malgré tout, l’ancien scribe des Avengers de retour chez Marvel se sent prêt à relever le challenge.
Plutôt que d’affronter le(s) run(s) de Miller, il décide de le prendre totalement à contrepied en allant chercher son inspiration dans la période Gerry Conway/Steve Gerber.
En effet, le plan du scénariste est grosso modo de renvoyer DD à San Francisco et de le remettre à la colle avec la Veuve Noire dans des aventures plus lumineuses.
Le diable rouge devait redevenir un aventurier à forte visibilité, sorte d’étendard officiel de la ville, se confrontant à tout l’univers Marvel plutôt qu’un vigilante confiné dans son quartier.

Le soap et la grivoiserie étant deux des ficelles qu’affectionne particulièrement Englehart, il comptait développer une sorte de triangle amoureux voire d’union libre avec DD et la Veuve en couple à la ville et Murdock et Karen Page à la maison.
Dans cette optique de revenir à un DD pré-Miller, il prévoyait aussi de briser l’image de solitaire du héros et de faire du duo des membres des Vengeurs de la Côte Ouest, série qu’il animait à l’époque.
On retrouve là une autre des marottes d’Englehart qui adore tisser des liens entre les séries qu’il écrit en parallèle.
On se souviendra ainsi de Mantis, Vif-Argent ou Doctor Doom qui faisaient régulièrement la navette entre West Coast Avengers, Fantastic Four et Silver Surfer.

West_Coast_Avengers_Annual_Vol_1_1
© Marvel Comics

Son plan est validé par l’editor Ralph Macchio puisqu’on lui accole le débutant Louis Williams comme dessinateur régulier et que le run est annoncé en grande pompe dans Marvel Age (revue servant de vitrine publicitaire pour les comics Marvel et mine d’infos sur les projets avortés).
Steve Englehart pose même ses pions en faisant revenir la Veuve Noire et en lui donnant un rôle d’importance dans le premier annual de West Coast Avengers.

Et là, patatras!!
Tout bascule et au dernier moment Marvel annonce que c’est Ann Nocenti qui reprendra la série au numéro 238 après un fill-in du mystérieux John Harkness.
Harkness qui est en fait le Alan Smithee de Steve Englehart, pseudonyme qu’il utilise pour les oeuvres qu’il renie.
Pourquoi? Comment?

En fait, la bisbille est née du fill-in d’Ann Nocenti et Barry Windsor-Smith (promis, on y revient dans le prochain article consacré au diable rouge).
Dans cet épisode, Ann a déjà renoué les liens entre la Veuve et DD mais sous un jour plus tendu que dans les plans que prévoyait Englehart.
Ce dernier demande à Macchio d’imposer à Nocenti de changer son histoire pour s’adapter à la sienne, ce à quoi Macchio lui rétorque « non, elle est editor, c’est à toi de t’adapter ».
Le scénariste prend la mouche et même s’il effectue les retouches demandées à ses dialogues décide de s’en tenir à cet unique épisode.
La jeune femme appelée pour écrire un bouche-trou se retrouve du coup propulsée sans vraiment l’avoir demandé nouvelle scénariste de Daredevil tandis que Williams reste confirmé à son poste de dessinateur.

DD Widow
© Marvel Comics

Mais que contient donc cet épisode?
Une longue discussion entre Daredevil et la Veuve Noire sur l’image publique des super-héros; cette dernière soucieuse de véhiculer une image positive de leur « profession » essaie de convaincre son ancien amant de devenir avec elle les portes-paroles d’une femme politique.
Bien sûr, les retouches font que dans la version publiée Daredevil refuse de suivre la Veuve.
Suit une confrontation avec Klaw de retour de Secret Wars que DD battra sans trop de mal.

Si la partie scénaristique est difficile à juger en soi puisque l’épisode est devenu une impasse par la force des choses, on peut néanmoins remarquer que le dessin de Louis Williams est… sans aucun attrait.
Désespérément classique, sans force, imagination ou expressivité, le graphisme est tellement passe-partout et parfois proche de l’amateurisme que cela fait mal après les prouesses graphiques de Mazzuchelli et même après un Steve Ditko dont le graphisme original divise.

Ironie du sort, cet épisode sera traduit bien plus tard en France dans la version intégrale Daredevil afin de ne pas couper l’épisode double concluant la saga de Typhoid Mary.
Plus ironique encore, des traces des plans avortés de Steve Englehart semblent avoir ressurgi dans les épisodes de Mark Waid.

DD Klaw
© Marvel Comics

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