
C’est peut-être ce comic book qui est le plus révélateur du bras de fer qui est alors en train de se construire entre John Byrne et ses editors et d’une certaine mégalomanie de l’auteur (mais fructueuse).
Déjà, jetez un petit coup d’oeil à cette couverture de Byrne.
Là où est censé se trouver le timbre présentant les personnages, nous pouvons voir une adresse de Byrne à l’encontre de Marvel :
« Hey guys ! I know it’s Assistant Editors’ Month but let’s not do something too silly on the cover, okay ? »
C’est donc un message clair qu’envoie l’auteur envers le staff éditorial en prenant le lecteur à témoins : « C’est mon comic book, j’en fais ce que je veux ! »

En effet, ce numéro, nous présentant le procès de Red Richards, est censé être l’apothéose d’un story-arc du scénariste-dessinateur à propos de Galactus et celui-ci ne compte certainement pas mettre cela de côté pour faire plaisir à Jim Shooter.
Il affirme d’ailleurs cette volonté dès la première page de l’histoire au sein d’un dialogue entre lui et l’assistant editor Mike Higgins où il explique que « les Fantastic Four détestent quand on maquille une de leurs histoires ».
Il en profite au passage pour en rajouter une couche sur sa blague d’Alpha Flight 6 avec un Mike Higgins déclarant « personne n’a envie de voir un comic book Marvel composé de 22 pages blanches ».
Sûr de son statut de superstar, John Byrne accomplit ici son geste punk du moment vu la manière dont il fait entrer son histoire dans le cadre de l’opération AEM.
Reprenant la tradition des numéros de Stan Lee et Jack Kirby qui voyaient les deux auteurs apparaîtrent dans l’histoire au détour d’une case, et ce conformant donc au gimmick type « 4ème mur » alors en vigueur ce mois-ci, Byrne devient un protagoniste de l’histoire.
Alors que tous les autres numéros de l’Assistant Editors’ Month mettent en scène des editors, l’auteur se met lui-même en scène et adresse ici un joli doigt d’honneur déguisé à Shooter qu’on pourrait décrire par : « Tu vois ? Je t’obéis mais je joue selon mes règles ».

Toujours prêt à se friter avec son ex-collaborateur Chris Claremont, il en profite au passage pour se payer la tête d’une des créations de ce dernier, la princesse Shi’Ar Lilandra, au travers d’une ligne de dialogue: « Why that arrogant witch! I always had the impression she was too full of her own importance, but to threaten the Fantastic Four…! »
Cette déclaration fait écho à une scène de X-Men 167 où Lilandra intervenait auprès de FF en critiquant leurs actions envers Galactus.
Clairement, on peut voir là une certaine irritation de Byrne qui fait signifier à Claremont de ne pas venir jouer sur ses plates-bandes.
La dernière page met en plante les graines de « The Last Galactus Story » qui sera développée dans le magazine Epic Illustrated mais restera malheureusement inachevée tandis que la mégalomanie de John Byrne se confirmera quelques épisodes plus loin avec l’épisode 269 où il utilisera une version « décomposée » de sa signature pour un message extra-terrestre signifiant « I claim this world ».

Au final, et paradoxalement, Byrne livre avec ce numéro et Alpha Flight 6 certainement deux des meilleurs épisodes prenant cadre dans ce mois spécial et prouve que la mégalomanie peut parfois faire bon ménage avec le talent pour produire des résultats de haut-vol… tout du moins pour un certain temps.
