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Memory of a (previously) free Festival: Bowie Glastonbury 2000

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©BBC & ©Glastonbury Festival Limited & ©Jones/Tintoretto Entertainment Company LLC & ©Parlophone Records Ltd

25 juin 2000: David Bowie revient au Glastonbury Festival après 30 ans d’absence (il avait participé à la seconde édition) pour une performance qui clôt des années 90 qui furent sa résurrection et qui entérine un changement de direction déjà perceptible dans l’album Hours de 1999.

30 novembre 2018: Tant qu’à battre le fer de la nostalgie pour les disparus tant qu’il est chaud, autant conclure une année riche en rééditions en tous genres avec une édition  double CD + DVD de ce concert.

Commençons tout d’abord par revenir sur la version filmée du concert qui entérine les nouvelles aspirations de l’ex Ziggy Stardust et démontre une fois de plus sa maîtrise de ses propres symboles pour construire sa légende.

Hours, comme nous l’avons dit plus haut, fut un album qui décontenança plus d’un fan puisque Bowie revenait à un versant plus mélodique et ouvertement pop de sa musique après une dizaine d’années riches en expérimentations.
L’album faisait ainsi la part belle à des chansons aux structures classiques, des accords purement « bowiens » réminiscents de sa période 70-72 et avec des airs très sucrés… voire franchement saccharinés par moments.

Cependant, comme souvent chez le Thin White Duke, les changements peuvent souvent se percevoir bien avant et pas nécessairement sur les albums.
Ainsi, la tournée Earthling avait vu de plus en plus de « tubes » et classiques de son répertoire revenir envahir les setlists (« Heroes », Life on Mars, My Death, All The Young Dudes, The Jean Genie…) et Bowie, en participant au Bridge School Benefit Shows de Neil Young, fut marqué par la prestation épuré de ce dernier aux antipodes de son show technoïde et se mit dès lors à effectuer plusieurs performances accoustiques (principalement pour des shows radio) qui démontraient une envie de retour aux sources.

Hours et la mini-tournée qui s’ensuivit confirma cette envie et marqua la scission entre lui et un Reeves Gabrels qui souhaitait continuer dans la veine electro-indus-metal.
Glastonbury 2000 entame un nouveau mouvement dans la carrière de Bowie qui ne souhaite pas seulement s’en tenir enfin à un aspect intimiste mais bien à enfin assumer son statut de légende du rock.
Rassuré par une légion d’héritiers qui n’ont cessé de revendiquer son héritage tout au long des années 90 (Nirvana, Nine Inch Nails, Placebo, Pulp, Suede, Blur, Marilyn Manson, Smashing Pumpkins, Goldie, Laurent Garnier…), il décide de regarder son immense catalogue en face (ce qu’aurait dû montrer l’album mort-né Toy) et pose avec ce concert le patron de ce que seront ses 2 tournées des années 2000.

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©BBC & ©Glastonbury Festival Limited & ©Jones/Tintoretto Entertainment Company LLC & ©Parlophone Records Ltd

Le show commence donc sur un énorme symbole reflet de cette nouvelle ambition puisque Bowie envoie Mike Garson ouvrir le show tout seul comme il l’avait fait lors du concert d’adieu de Ziggy Stardust avant que le groupe vienne embrayer sur un morceau charmeur, la reprise de Wild is the Wind, caractérisée par une progression de la douceur la plus intime au romantisme le plus épique.
Surgit alors un David Bowie qui s’est fait le look hippie-androgyne… qu’il arborait lors de sa première venue à Glastonbury, celui de la période The Man Who Sold The World et Hunky Dory, marquant ainsi la première incursion flagrante de la nostalgie dans les symboles utilisés par l’artiste.

Dès lors, Bowie va jouer le jeu du rock de stade en alternant entre ses plus énormes tubes (« Heroes », Ziggy Stardust, China Girl…) et des chevaux de bataille classiques (Station to Station et Stay) et récents (Little Wonder, I’m Afraid of Americans et Hallo Spaceboy).
Outre China Girl, l’artiste en profite pour aller repêcher dans la décennie maudite le tube mineur Absolute Beginners et offrir une excellente relecture de Let’s Dance.

Visuellement le spectacle est prenant en diable et nous montre un Bowie en parfait showman qui sait soulever les foules et la manipuler, un groupe plein d’enthousiasme et un public en pleine communion.
Bref, on se prend très vite au jeu et on se retrouve propulsé dans la campagne anglaise en train de taper des mains, de chanter en choeur et de danser comme un beau diable devant la grande pyramide en oubliant que le temps et notre écran nous séparent de celle-ci.

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©BBC & ©Glastonbury Festival Limited & ©Jones/Tintoretto Entertainment Company LLC & ©Parlophone Records Ltd

Par contre, dès que l’on retire l’image et que l’on se concentre sur le double CD le bât blesse et malheureusement tous les défauts du show sautent aux oreilles.

Plusieurs explications à cela, au premier rang desquelles un stupide problème de climatisation cassée dans le bus ayant transporté Bowie et son groupe à Glastonbury.
Se remettant déjà d’une laryngite, le Duke n’est pas dans sa meilleure forme vocale et, même si il fait preuve de beaucoup de courage et de générosité en s’attaquant à des tours de chant tels que ceux de Wild is the Wind ou Life on Mars, peine quelque peu dans les changements d’octave et le souffle court est perceptible à plusieurs endroits.

De même, le groupe n’est pas réellement « aiguisé » et cela s’entend aussi.
Alors en pleine recomposition avec le retour d’Earl Slick à la guitare et le multi-instrumentiste Mark Plati comme directeur musical, le backing band de Bowie n’est pas encore la machine de guerre affutée qui sera capable de traverser sans souci 30 ans d’un répertoire hétéroclite comme sur les tournées Heathen et Reality.
Du coup, l’interprétation des chansons est très sage, trop en retenue, jouée avec le doigt sur la couture du pantalon et à l’exception de Let’s Dance ne transcende pas réellement les morceaux par rapport à leurs versions studio.
On a même droit à une version quelque peu chaotique de Station to Station, un peu comme du Stones des mauvais soirs période Ron Wood, ce qui chagrina quelque peu votre serviteur (sachant que c’est son morceau préféré).

Il faut de surcroît compter avec ce que je considère comme le gros point noir des années 99-00, les deux choristes Holly Palmer et Emm Gryner dont les voix sont beaucoup trop sucrées et entraînent certains des morceaux les plus pop vers un excès de diabète dont ils n’ont pas besoin.

Dernier point contestable, selon le versant de Bowie que vous aimez, est son approche plus dépouillée de l’interprétation live.
Les tournées Outside et Earthling avaient pris acte des évolutions technologiques et les shows étaient renforcés nombre d’effets électroniques, de boucles et de samples (y compris sur la voix) intégrés de manière intelligente aux instruments et raccord avec les univers de ces 2 albums et l’air du temps qui était au crossover entre rock et musiques électroniques.
Alors certes, on pourrait dire qu’une fois de plus Bowie saisit l’air du temps et qu’il précède de peu la vague du néo-rock sobre et réactionnaire (aucun sens péjoratif ici) des groupes en « The » (Strokes, White Stripes, Hives, Libertines…) et que cela joue en faveur des morceaux classiques.

Sauf que pour qui a suivi les deux tournées précitées, les morceaux de Outside et Earthling joués ici sonnent plus « faméliques » et moins percutants qu’autrefois (même si Little Wonder conserve sa boucle drum n’ bass sans laquelle il ne pourrait exister).
Ceux qui avaient aussi adoré les relectures passionnantes de Stay et The Man Who Sold The World feront eux aussi la fine bouche en entendant le retour des arrangements classiques sur ce live

Un live qui se déguste donc plus dans l’alliage du « Sound & Vision » plutôt que de l’écoute pure pour pouvoir s’apprécier et qui vaut principalement pour l’étape de transition, le chapitre qu’il constitue dans l’évolution du grand roman « bowien » qui s’est toujours construit autant en studio que sur scène.

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©BBC & ©Glastonbury Festival Limited & ©Jones/Tintoretto Entertainment Company LLC & ©Parlophone Records Ltd

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