
Et les mésaventures continuent pour Hulk puisque le Panthéon l’envoie retrouver Achille en Israël (386-387).
En effet, l’irascible blondinet à décidé de faire cavalier seul et d’éliminer un enfant suite à une vision de Delphi qui l’a vu devenir un dictateur dans le futur.
Va alors s’engager une course poursuite dans les rues de Jérusalem entre l’enfant (et une amie à lui), Hulk, Achille, Rick Jones et l’héroïne israélienne Sabra.
Cette aventure permet à David de s’amuser et de questionner le lecteur avec la classique interrogation : « si vous aviez l’occasion de remonter le temps et d’assassiner Hitler enfant, le feriez-vous ? »
Il en profite au passage pour creuser les personnages d’Agamemnon et d’Achille.
Si le premier semble de plus en plus trouble puisqu’ ayant manipulé aussi bien Banner que son fils Achille, le second se révèle enfin presque touchant au travers de son passé.
Celui-ci est en effet un rescapé de Dachau dont l’histoire et les positions sont similaires à un Magneto, ce qui couplé aux questionnements sociaux de ces épisodes renforce d’autant plus la parenté de la série avec les mutants de Claremont.
La conclusion fera d’ailleurs grincer quelques dents.
David joue avec la maxime comme quoi derrière chaque grand homme se trouve une femme en nous révélant que l’enfant est manipulée par sa camarade de jeu.
Sauf qu’au détour d’une page l’auteur révèle à demi-mots qu’elle est la fille d’Yitzhak Rabin.
PAD questionne donc en sous-main la politique d’Israël ce qui lui valut quelques critiques à l’époque, ironie des choses pour ceux qui connaissent la judéité de l’auteur.

Comme toujours, l’humour et les références populaires sont là pour donner de la fraîcheur au tout.
Rick Jones est toujours utilisé de manière décalée en contrepoint comique de l’action.
Ulysse apparaît comme un voyeur coincé autant troublé qu’excité par la nudité de Delphi et Sabra déblatère toute seule face à un Hulk privé de la parole et qui ne peut donc la contredire.
David continue de truffer aussi sa série de clins d’oeil envers les choses qu’il aime que ce soit Jack Kirby, Twin Peaks, Code Quantum (répartie hilarante de Rick) ou les Simpson.
Seul petit échec, l’inclusion d’un sub-plot sur les paparazzis harcelant Betty et qui sera purement et simplement abandonné mais qui permettra plus tard d’en introduire un autre aux lourdes conséquences pour Rick Jones.
Autre légère ombre au tableau, la présence de Joe Rubinstein à l’encrage du numéro 387, professionnel pourtant émérite mais dont la plume donne des pages au trait plus cassant et beaucoup moins agréable à l’oeil.

Contre toute attente, Rick Jones va enfin se prendre la réalité comme un coup de poing dans l’épisode suivant (388).
Bruce et lui sont appelés à Los Angeles par Jim Wilson, neveu du Faucon et ancien partenaire de Hulk à la fin des années 70 (voulu à l’époque de sa création comme une version black de Jones).
Rick doit donner un concert au profit des malades du Sida tandis que Hulk doit assurer la sécurité.
En effet, un mafieux local a décidé d’envoyer un tueur, Speedfreek, éliminer l’amant de son fils qu’il considère comme responsable de l’infection de son héritier.
PAD réussit à nouveau à tenir son équilibre avec brio entre humour, fable sociale, soap et drame.
S’il réussit toujours à faire sourire le lecteur, que ce soit par une nouvelle référence à Twin Peaks, l’humour noir du bolide camé Speedfreek ou les vannes à fleurets mouchetés entre Rick et Jim, l’histoire ne prête pas à rire et réussit à émouvoir.
Elle réussit à introduire la réalité et son cortège de problèmes dans un univers de fiction sans pour autant tordre les personnages pour servir le scénario puisque ceux-ci restent cohérent avec leur nature.
Celui qui se prend cette réalité en pleine gueule, et qui par extension représente le lecteur qui descend de son nuage, c’est bien entendu Rick Jones.
Un Rick complètement déboussolé par l’annonce de la séropositivité de son ami Jim et encore plus choqué lorsque ce dernier est blessé.
Face au sang infecté, Jones reprend conscience de sa place de simple être humain et se trouve tétanisé, prenant conscience du danger bien réel de la maladie au contraire des guéguerres psychédéliques entre skrulls et krees.

L’épisode en profite au passage pour planter le sub-plot de la mère du célèbre orphelin qui semble être à la recherche de son rejeton.
PAD entame aussi les premiers pas du rapprochement entre Bruce et Betty.
Ainsi cette dernière prend conscience qu’elle est jalouse lorsqu’une femme s’approche d’un peu trop près de Hulk.
Mais c’est surtout la page finale où sa conversation avec le géant vert lui montre que la bonté et le sens moral de l’homme qu’elle aime est toujours là qui marque le lecteur, l’épisode se concluant sur un baiser amical.
Un très bel épisode qui touche avec justesse à un problème bien réel et fustige le lot d’incompréhension et d’intolérance entourant les homosexuels et les malades du sida.
Sauf que là, ce ne sont plus des grincements de dents de la part du lectorat auquel on assiste mais à une volée de bois vert.
Bien vite les pages du courrier des lecteurs se font l’écho de l’homophobie la plus rance d’une partie du lectorat qui crie au torchon pro-gay et qu’on ne les y reprendra plus à lire ces histoires de pédales.
Intolérance quand tu nous tiens (soupir).
Heureusement, d’autres lecteurs viendront contrebalancer tout cela en applaudissant le courage des auteurs.
Courage dont Peter David continuera à faire preuve lors d’une suite encore plus poignante à cet épisode quelque temps plus tard.

Bruce et Rick font ensuite escale dans les marécages de Floride afin de retrouver un savant du Panthéon (389).
Cet épisode fill-in accueillant Man-Thing est l’oeuvre de Gary Barker au dessin et d’un Tom Field au scénario qui singe maladroitement le style de PAD.
Le résultat n’est ni passionnant ni touchant et s’il arrive à être drôle c’est parce qu’il prend involontairement le tour d’une poursuite à la Scooby-Doo.
Pour le coup, c’est le premier fill-in réellement dispensable de ce run…. avant l’un des arcs les plus fameux.
Mais ça c’est une autre histoire.
