Graphic Nuggets, On the Run(s), Vert de Gris

0/Qui est Keown? (+ Hulk378 & 380)

HulkKeown
©Marvel Comics

Hulk est donc de nouveau vert et Bruce Banner semble enfin en paix avec lui-même.
S’ouvre alors la plus longue période de stabilité de la série puisque l’ère du Panthéon durera jusqu’au numéro 425, même si comme toujours David fait évoluer sa série en permanence.
Cette période qui débute avec l’arrivée de l’excellent Mark Farmer à l’encrage est un succès tant critique que public puisque les ventes progressent de 30% sur l’année 91 et d’encore 20% l’année suivante.
Fin 92, la série Hulk se vend à 500 000 exemplaires par mois, ce qui replace le géant vert parmi les personnages les plus populaires de Marvel; ce succès étant amplement mérité.

Cette ère est marquée par les exploits d’un jeune prodige qui est déjà là depuis quelques épisodes, comme nous l’avons vu précédemment ici et , mais qui va véritablement exploser avec l’entrée en scène du Hulk intelligent: Dale Keown.

Né le 23 juillet 1962 de parents d’origines écossaises (McKeown est leur véritable nom), le jeune Dale naquit et passa une enfance tranquille à Ottawa.
Contrairement à la plupart des artistes cités dans ce blog, le dessin ne fut pas sa passion première.
Non, c’est plutôt le démon qui saisit l’âme de Dale puisqu’il se découvre un amour délirant pour le hard rock, le métal… bref, tout ce qui fait mal aux oreilles et fait peur aux parents.
Les cheveux s’allongent, les jeans se déchirent, les t-shirts s’obscurcissent et s’ornent de ces logos à la typographie illisible et notre jeune ami lâche bien vite l’école pour tenter sa chance en devenant bassiste d’un groupe de Hard.

Dale Keown

C’est seulement à l’âge de 18 ans qu’il découvre enfin les comics en piochant un exemplaire des Fantastic Four dessiné par John Byrne.
Complètement transporté par la performance graphique de son compatriote canadien, Keown devient une « Byrne Victim » et achète n’importe quel comic book signé par sa nouvelle idole.
En parallèle, il développe une autre passion dévorante pour le personnage de Hulk et lorsqu’il ne lit pas ses petits fascicules, passe son temps à recopier, étudier et tenter d’émuler le style de Byrne.

Reste que la musique est toujours son premier choix de carrière et que le dessin n’est pour lui qu’un hobby.
Obligé de faire bouillir la marmite, il consent néanmoins a accepter un emploi de boucher et utilise sa première paie pour s’acheter une table à dessin afin de dégourdir ses doigts après ses longues journées de boulot.
La vie suit paisiblement son cours et Dale continue de se partager entre découpage de viande, jams avec ses potes et essais graphiques sur sa nouvelle table jusqu’au jour où il aperçoit un reportage télévisé présentant un tout récent éditeur indépendant de comics basé dans la ville où il réside: Aircel.

Dale prend son téléphone, décroche un rendez vous avec le boss d’Aircel, Barry Bair, lui présente des planches des Fantastic Four qu’il vient de dessiner et décroche illico presto une place dans la boîte, lui permettant enfin de quitter le monde de la boucherie.
Débutant comme encreur sur les séries Elflord puis Samuraï, ses progrès stupéfient tellement son boss qu’il est propulsé dessinateur de Dragonforce qu’il s’approprie complètement puisqu’il finira par en écrire aussi les scénarios.

Un de ses comics atterrit un jour entre les mains de Joe Rubinstein qui sent tout le potentiel du jeune artiste.
Il contacte ce dernier en lui proposant de soumettre des crayonnés pour l’encyclopédie Marvel Universe Update, dessins qui tapent dans l’oeil de l’editor Bob Harras qui commande de nouvelles planches à Keown avant de lui signifier qu’il fait dorénavant partie de la liste des (dessinateurs) actifs.
Peu après, notre jeune artiste fournit son premier comic book pour Marvel en dessinant un épisode de Nth Man.
Keown déborde de tant d’enthousiasme qu’il rend ses planches avec une semaine d’avance, ce qui prête quelque peu à sourire quand on connait la suite de sa carrière.

Bob Harras, editor des premiers épisodes de Peter David, transmet ensuite le numéro de Keown à la nouvelle editor de Hulk, Bobbie Chase, qui doit faire face à plusieurs défections de dessinateurs.
Dale devient le nouveau dessinateur régulier de Hulk ainsi que le cover artist de She-Hulk accomplissant alors en quelque sorte l’un de ses rêves puisqu’il se retrouve à mettre en scène son personnage préféré et à en illustrer un autre définitivement marqué par son idole.

Hulk378
©Marvel Comics

Pourtant, le démarrage de la période dite « du Panthéon » ressemble un peu à un moteur diesel puisque Peter David entrecoupe son intrigue principale de deux fill-ins aux ambiances bien différentes et qui permettent autant au scénariste de prendre ses marques tranquillement que de permettre à la team Dale Keown/Mark Farmer de peaufiner le rendu des épisodes principaux.

Ainsi, on a tout d’abord droit à un conte de Noël raconté par Rick Jones et qui sonne comme un dernier au revoir au Hulk gris (épisode 378).
Dessiné par Bill Jaaska, cet épisode se situe durant l’arc Ground Zero et nous conte les mésaventures du Rhino.
Au bout du rouleau et à la rue, le vilain souhaiterait se racheter et aussi avoir l’amour des gens.
Il devient Père Noël dans un grand magasin mais voit ses espoirs ruinés tant par l’intervention de Hulk que par sa propre instabilité.

C’est un épisode détendu du stylo où PAD renoue avec sa verve la plus bouffonne et méchante en s’en prenant à la période des fêtes, ce moment de l’année qui fait trembler n’importe quel parent normalement constitué.
Ca n’apporte strictement rien aux personnages ou aux intrigues en cours du scénariste mais c’est un défoulement jouissif qui donne du bon temps au lecteur.
Et puis rien que le fait de voir Hulk terminer en elfe du Père Noël vaut son pesant de cacahuètes.

Toujours dessiné par Jaaska, le fill-in suivant (380) est aussi noir et triste que le premier était comique.
Doc Samson est appelé à examiner le cas d’une tueuse, son témoignage devant décider de la condamnation à mort de la criminelle.
PAD retrouve ici sa fibre sociale avec un épisode très fort qui questionne la peine de mort et les carences du système judiciaire.
La très sombre conclusion montre tout l’écart qui peut parfois exister entre loi et justice tout en s’inscrivant dans les grandes thématiques de l’innocence brisée et des secrets familiaux qui sous-tendent l’ensemble de son run.
Etrangement, le trait de Jaaska convient parfaitement à cet épisode très terre à terre et nuancé.

Avec ces deux épisodes nous avons là les deux facettes du talent de Peter David et qui feront le sel des prochains épisodes, particulièrement ceux où il navigue de l’une à l’autre au sein d’un même épisode voire d’une même page.

Hulk380
©Marvel Comics

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